Ne troquez pas votre cigarette électronique pour un paquet de blondes. Plusieurs experts mettent en doute la validité scientifique d'une étude américaine selon laquelle le formaldéhyde contenu dans les cigarettes électroniques les rend cinq à quinze fois plus cancérigènes que le tabac.

France tv info vous explique pourquoi ces conclusions, publiées mercredi 21 janvier dans une lettre parue dans la dernière édition du New England Journal of Medicine, sont sujettes à caution.  

Un taux jamais atteint par les vapoteurs

Ce que dit l'étude : Les chercheurs ont constaté que du formaldéhyde, une substance cancérigène, pouvait se former durant le processus de vaporisation des cigarettes électroniques. Ils n'ont constaté aucune formation de formaldéhyde quand la machine utilisée pour "inhaler" la vapeur fonctionnait à faible voltage (3,3 volts). Mais quand le liquide contenu dans le réservoir de la cigarette électronique était beaucoup plus chauffé (avec 5 volts), le taux de formaldéhyde qui se formait alors était largement plus élevé que ceux trouvés avec la combustion des cigarettes conventionnelles.

Ce que disent les experts : Pour Peter Hajek, directeur de la division sur le tabagisme à la faculté de Médecine et de dentisterie de Londres, cette recherche ne reflète pas la réalité. "Quand les fumeurs de cigarettes électroniques surchauffent le liquide cela produit un goût âcre désagréable ce qu'ils évitent de faire", explique-t-il dans un communiqué. Un avis partagé par le professeur Jean-François Etter, de l'université de Genève (Suisse), interrogé par Slate"Il semble qu’ils ont testé du dry puffing, des bouffées sans liquides, qu’aucun vapoteur n’inhale, Comme dit mon collègue Konstantinos Farsalinos, c’est comme carboniser un steak et ensuite tester s’il y a des substances cancérigènes. Mais personne ne mangera jamais ce steak." Dans Le Figaro, le docteur Jacques le Houezec, consultant en santé publique et enseignant universitaire en pharmacologie de la nicotine, estime aussi que la puissance de 5 volts testée par les chercheurs est irréaliste : "Les utilisateurs ne sont donc jamais exposés à de telles concentrations de formaldéhyde. Dans des conditions normales de vapotage, le taux de formaldéhyde contenu dans les e-cigarettes est équivalent à celui de chewing-gums à la nicotine."

Le tabac contient bien d'autres toxiques  

Ce que dit l'étude : Un consommateur de cigarettes électroniques qui inhale chaque jour l'équivalent de trois millilitres du liquide vaporisé chauffé au maximum, absorbe quelque 14 milligrammes de formaldéhyde. En comparaison, une personne qui fume un paquet de cigarettes papier par jour absorbe environ trois milligrammes de ce cancérigène. Sur le long terme, l'inhalation de 14 milligrammes (+ ou - trois mg près) de cette substance nocive chaque jour pourrait multiplier par 5 à 15 fois le risque de cancer.

Ce que disent les experts : Interrogé par l'agence Reuters, David Abrams, de l'organisation américaine anti-tabac Legacy, se dit inquiet que l'étude soit diffusée hors contexte "de la pire des façons". Car comme le soulignent Le Monde et le Figaro, les résultats de l'étude suggèrent que le formaldéhyde rend à lui seul la cigarette électronique plus cancérigène que le tabac. Or, la combustion d'une cigarette classique produit beaucoup d'autres composants toxiques, dont certains, comme les goudrons ou le monoxyde de carbone, absents de la vapeur de e-cigarette, sont plus nocifs que le formaldéhyde.  Peter Hajek estime ainsi que si la vapeur de cigarette électronique n'est pas aussi sûre que l'air pur des montagnes, elle est toutefois bien moins nocive que la cigarette conventionnelle.